Fig. Festival Indexé de Graphisme de Liège

Fig. est un festival de graphisme ayant lieu à Liège. Il propose un programme composé de conférences, d’expositions, de workshops et de tables rondes, s’adressant à un large public qui pourra y découvrir les multiples facettes du design graphique contemporain.

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Émilie Aurat

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Un système d’écriture créole et son héritage africain : dessiner l’Afáka

Intro et présentation du contexte 

Les systèmes d’écritures sont les témoins des événements et renversements géopolitiques dans l’Histoire. Dans un même temps, ils sont le terrain d’enjeux culturels et sociétaux.

En tant que dessinatrice de caractère je me suis intéressée à la problématique de dessiner une police pour un système d’écriture épris de problématiques sociétales dues au colonialisme.

Comment les problématiques culturelles et identitaires au sein d’une population influencent-elles la genèse d’un système d’écriture? Comment, à son tour, le design typographique et la représentation dans les outils numériques influencent-ils la visibilité de ces identités et cultures?

C’est sur le cas du système d’écriture créole Afáka que j’ai effectué un travail typographique visant à mettre en lumière les différents enjeux, depuis sa création du système d’écriture jusqu’à son design et son entrée prochaine dans l’Unicode. J’ai tenté par là un travail de valorisation d’une culture invisibilisée à travers la proposition d’une famille de police de caractère.

Aperçu des systèmes d’écritures inclus dans le projet “The World’s Writing System” en 2020. 37 d’entre eux ont été créés sur le continent Africain.

Bien qu’il soit originaire du Suriname, l’Afáka est représentatif de notre héritage sociétal des enjeux du colonialisme dans la culture graphique et linguistique africaine. Dans cet article je détaillerai quels liens généalogiques ce syllabaire d’écriture marron entretien avec les systèmes d’écritures du continent Africain, et quels enjeux cela entraîne pour son développement dans les outils numériques. Dans un premier temps nous ferons connaissance avec ces systèmes d’écritures africains, nous aborderons ensuite le cas de l’Afáka

C’est à l’Atelier National de Recherche Typographique, que je me suis intéressée aux systèmes d’écriture africains et créole et leur lien entre eux.

Ce projet a été soutenu entre 2018 et 2020 au sein du programme Missing Scripts, créé par Johannes Bergerhausen et Jérôme Knebusch, fondateurs du projet The World’s Writing Systems et Decode Unicode, et a été principalement encadré par la professeure et typographe Émilie Rigaud. Le programme est mené en collaboration avec The Script Encoding Initiative, représentée par la Dr. Deborah Anderson, qui fait également partie du consortium Unicode.

Les données de cette étude s’appuient principalement sur celles du projet The World’s Writing Systems et celles délivrées par le consortium Unicode. Cependant, des systèmes d’écritures possédant moins d’informations comme celles mentionnées dans les écrits de Saki Mafundikwa ont été intégrées à ces analyses afin d’établir un point de vue plus complet du sujet.

Les systèmes d’écriture africains

Chronologie

Les systèmes d’écritures par ordre chonologiques en deux temps.

On peut séparer l’Histoire des systèmes d’écritures africains en deux périodes. La première, la plus longue, s’étend de -XIIIe au IVes. On peut la considérer comme les premiers temps de l’Écriture. Cette période compte majoritairement des systèmes d’écritures hiéroglyphiques. Dans un second temps, à partir de 1830 jusqu’à nos jours, 36 systèmes d’écritures seront créés. Ces deux périodes sont donc séparées par seize siècles avec aucun nouveau système d’écriture recensé à ce jour. Cette résurgence en 1830 correspond à un période de « décolonisation » et d’un protectorat des États occidentaux sur les pays du continent africain. Comme en réaction aux événements politiques et sociétaux, ce contexte amène une recherche d’identité culturelle et graphique à travers l’écriture. Il est à noter que chaque période de création de systèmes d’écriture correspond à l’importation de systèmes d’écriture par des populations extérieures, pour des relations commerciales mais également des systèmes de domination. L’arrivée du latin précède de peu la seconde vague de création de systèmes d’écritures.

Importation de système d’écritures étrangers.

Contextes de création

La création ou l’importation d’un système d’écriture est souvent accompagnée d’un contexte socio-historique. On note alors deux démarches de créations différentes :

La première est une influence externe : à l’initiative de missionnaires qui utilisèrent des symboles locaux, comme pour l’alphabet Nigérian, le Medefaidrin. La seconde est à l’initiative des natifs, en réaction à une culture dominante et le besoin de valoriser sa propre identité culturelle et graphique : C’est le cas du Bamoun, un syllabaire camerounais. De même que les contextes sociétaux et politiques influent sur la création d’un système d’écriture, ils ont des conséquences sur l’altération de ces savoirs.Bien qu’interdit en 1936, le Medefaidrin, qui reprend des symboles ancestraux, survécut, mais finit par se dissoudre durant les guerres civiles. Le Bamoun a été inventé par le roi Njoya à la fin du XIXe s, mais le régime colonial en a détruit jusqu’aux presses qui en imprimaient les ouvrages. Ces systèmes d’écriture sont déclinés voire disparus pour être remplacés par l’alphabet latin.

Situation géographique et généalogies

D’après les données à disposition, ce sont les pays du golfe de Guinée qui recensent le plus d’activités au niveau des systèmes d’écriture. La plupart date de la seconde vague de création.
Par ailleurs, nous verrons que celles-ci sont d’ailleurs trés liées généalogiquement.

Aujourd’hui on compte 37 système d’écriture originaire du continent africain. 16 d’entre eux sont encore utilisés (Rouge et bleu foncé). 26 sont intégrés dans l’Unicode (Bleu clair et foncé).

Le syllabaire Afáka

Lien avec les systèmes d’écriture africains

Arbre Généalogique présumé de l’Afáka.

Comparaison des sources Vaï et Afáka.

D’après les sources à dispositions, l’Afáka est particulièrement lié aux systèmes d’écriture du golfe de l’Ouest de l’Afrique. L’hypothèse serait que les symboles auraient été exportés avec les esclaves jusqu’en Amérique du Sud, conservés par leur descendants au sein des sociétés marronnes, et finalement ré-utilisés au sein d’un système d’écriture.

Histoire de la population et moeurs

Répartition de la population Ndjuka au Suriname.

Le peuple Ndjuka est une population installée le long du fleuve Maroni. Il fait partie des peuples dits Marrons, les esclaves fugitifs ayant résisté à la domination occidentale et à la colonisation. Cette société métissée se compose en majorité d’esclaves africains déportés et d’un pourcentage plus faible de natifs américains. Ensemble, ils construisent de nouvelles sociétés alternatives sur la base de la rencontre entre leurs différentes cultures et connaissances respectives.

Jean-Yves Parris, dans son livre Interroger les morts, a produit une analyse du deuil chez les Ndjukas. Il y souligne la problématique de la perpétuation des traditions. Il s’interroge sur la place que notre société contemporaine donne aujourd’hui à la société Ndjuka. Il démontre alors que toute réflexion sur l’évolution culturelle n’est pas anodine et renvoie systématiquement à une question identitaire.

Dans cette veine, nous pouvons nous interroger sur ce que la création du syllabaire Afáka puis son développement dans les outils numériques entraînent pour le futur de la culture Ndjuka.

Histoire de la création puis du développement de l’Afáka

Extrait du récit de la création du système d’écriture Afáka.

Le syllabaire a été créé autour de 1800. D’après la légende, son créateur, Afáka Atumisi aurait vu en songe un esprit qui lui aurait ordonné de créer une écriture pour son peuple. Ce n’est qu’en 1810, lors du passage de la comète de Halley, que Afáka Atumisi interpréta cela comme un signe pour diffuser le syllabaire.

De nombreux protagonistes se rencontrent autour de la genèse du système d’écriture. Tout d’abord Afáka Atumisi, et les premiers initiés, à qui il enseignera le système d’écriture. Ensuite, ce sont les missionnaires et scientifiques occidentaux qui entament des démarches d’ initiations auprès des usagers Ndjukas afin de faciliter leur christianisation. L’Afáka devient alors un terrain d’ enjeux culturels qui se heurtent à la tradition marrone de la population. En créant un langage écrit et en le diffusant (non-seulement à des Ndjuka mais aussi à des occidentaux ) Afáka Atumisi va à l’encontre d’une hiérarchie établie au sein de la population. Le système d’écriture sera par la suite interdit par les autorités Ndjukas, et son développement restera très localisé.

Transmission de l’Afáka.

Depuis 1810, la transmission du système d’écriture est assurée par les Edebukumans (littéralement, Head Book Man, L’Homme à la tête de l’écriture), qui se transmettent la responsabilité du devenir de l’écriture. Le premier était Afáka Atumisi, et aujourd’hui, l’actuel Edebukuman le spécialiste André Pakosie.

Trois exemples de l’Afáka sur des documents contemporains.

Aujourd’hui parmi les documents traitant du syllabaire on compte essentiellement des éditions présentant et traduisant des archives, afin de relater l’Histoire de la population, ses mœurs et ses traditions. Mais on trouve également des livres de grammaire pour apprendre à utiliser et lire le système d’écriture. Enfin, nous devons mentionner le travail d’artistes tel que Marcel Pinas qui réutilisent le patrimoine Ndjuka, dont le syllabaire dans leurs œuvres.

Le syllabaire compte à ce jour peu d’usagers : à peine 5% des locuteurs du Ndjuka écrivent avec le syllabaire d’ Afáka Atumisi. Il est tout de même à noter, selon les observations de A.Pakosie, une recrudescence de l’intérêt de la jeune génération pour l’Afáka. Je mentionnerai pour ma part le travail de recherche du typographe Agyei Archer qui s’interrogeait sur la création de diacritiques.

Dessiner l’Afáka

Aperçu du syllabaire dans la proposal rédigé par le linguiste Mickaël Everson.

L’Afáka est un syllabaire comprenant 36 glyphes. Parmi elles, on compte six nouveaux glyphes créés par André Pakosie adaptés à la langue contemporaine des Ndjukas. Deux d’entre elles sont des ponctuations (Point et Point d’interrogation). Enfin le syllabaire possède un idéogramme qui représente la comète de Halley.

Destination et démarche

La destination de cette future police a été définie en vue de la nature des documents qui nous sont parvenus. Comme mentionnés auparavant, les manuscrits rédigés avec de l’Afáka sont aujourd’hui mis en page avec des textes expliquant leur contextes historiques, proposant des traductions, ou encore dans des livres d’apprentissage de la lecture. À partir de là, le but était de produire un caractère qui promulguerai et valoriserai la culture Ndjuka à travers ce type de publication.

Le caractère a donc été dessiné à partir de deux étapes : Tout d’abord chaque glyphe a été répertorié dans ses diverses apparitions, afin de déterminer ses formes les plus courantes, et la place que celles-ci tiennent au sein d’un texte dans l’édition annexe Afáka, the Ndjuka Writing System. Ce document les datait, les classait par type, indiquait les différents auteurs et référençait l’occurence de leur apparition et leur comportement dans un texte. Ensuite, en respectant la tradition Ndjuka en se référant régulièrement au spécialiste désigné de l’écriture, l’Edebukuman André Pakosie.

Planche exposant la syllabe [NI] ainsi que des notes de André Pakosie à mon intention.

Graisses selon la nature et les enjeux des sources

D’après les sources que l’on dispose aujourd’hui, la police de caractère pour le syllabaire Afáka est dessinée pour côtoyer l’alphabet latin, à la manière dont le Ndjuka cohabite avec des langues occidentales.

On distingue cependant deux contextes : Dans un premier temps, des textes en latin parlant du système d’écriture Afáka. Ils en montrent chaque forme, plutôt isolée. Dans un second temps, des paragraphes Ndjuka rédigés en Afáka suivies de différentes traductions, avec le système d’écriture latin. Deux graisses seront proposés pour ces deux types de contextes

Ductus selon la récurence des formes

Selon l’Annexe qui répertoriaient les différents formes pour chaque syllabe, certains caractères écrits à la main proposent des variations. On peut en rapporter en 4 natures :

  • L’orientation du caractère

Les syllabes [KO] Q et [GO] S remettaient d’autant plus en question les hauteurs, la répartition des ascendantes et descendantes de la fonte, car elles prêtent aisément à confusion entre elles.

Certains caractères présentaient des orientations différentes : horizontales, verticales, en miroir... Cela répond à la manière dont l’auteur va spontanément exécuter la forme.

  • Le geste graphique

On peut observer chez le [DO] des degrés différents de rotondité.

La gestuelle de l’auteur influence le dessin du glyphe dans sa fluidité et sa (non-)cursivité.

  • Le processus d’ exécution

Des terminaisons en boucles pouvaient devenir des ronds comme sur la syllabe [ WE/WI ].

Chaque caractère comportait des niveaux différents de géométrisation ou d’essentialisation de son dessin selon l’interprétation qu’en avait l’auteur.

  • L’interprétation

Les caractères suivants prêtaient facilement à interprêtation. La syllabe BO était, selon certains auteurs familiers au latin très ressemblante à un dessin de plume, tandis que la syllabe A était souvent dessinée comme un a bas-de-casse scripte.

Ces exemples de glyphes presque figuratifs ou très ressemblants à des lettres ou chiffres utilisés en Europe posaient la question d’une possible sur-interprétation de la forme.

Pour une syllabe, les formes de glyphes sont souvent disparates d’une source à l’autre. De plus, certaines syllabes prêtaient facilement à confusion. Dans ces cas ambigus, se rabattre sur d’ autres formes aurait permis une identification plus fluide. Cependant cette option aurait sûrement conduit à des absurdités, en mélangeant des variations de différentes périodes. En effet sont-elles aussi lisibles pour des usagers aujourd’hui qu’elles l’étaient en 1910 ? Ce dilemme est étroitement lié à une deuxième difficulté : celui du choix des sources. Il ne s’est pas seulement agi de choisir une source et d’en faire une traduction vectorielle. Il fallait également sélectionner les documents les plus cohérents avec mon propos. C’est à partir de ce travail éditorial de l’annexe Afáka, the Ndjuka Writing System que sont esquissés les premiers dessins du système d’écriture. Mais ce sont bien les commentaires de A. Pakosie qui m’ont fait trancher sur les formes à choisir.

Graisses de la famille de police Maroni.

Sets stylistiques de la famille de police Maroni.

À l’issue des recherches, deux graisses ont été proposées. Elles sont adaptées à deux types d’utilisation  : Tandis qu’une première version Demi est adaptée au premier cas, pour une mise en valeur des caractères Afáka isolés à l’intérieur d’un texte latin, des caractères Regular proposent de s’adapter à l’usage d’un texte de traduction, qui compte des paragraphes entiers rédigés en Ndjuka.

Deux sets stylistiques typographiques pour chacune des deux graisses sont proposés au terme de cette recherche. La première contient les formes les plus horizontales, la seconde, les verticales. Ainsi, l’utilisateur peut choisir entre deux ensembles, ou individuellement, caractère par caractère, selon son usage des fontes.

Aperçu de la police Maroni dans un contexte de traduction.

Aperçu de la police Maroni dans un contexte pédagogique.

Conclusion

Le syllabaire Ndjuka d’Afáka Atumisi devrait intégrer prochainement l’Unicode. Il est encore trop tôt pour prédire alors, la suite de son évolution.

Mon intention derrière ce projet typographique est de proposer un design suffisant à assez d’usages et de contextes pour qu’une valorisation de la culture Ndjka soit possible. Ce projet est une proposition parmis de nombreuses autres. Mon interêt est le rôle des système d’écriture comme affirmation d’une culture.

A Creole writing system and its African heritage: drawing the Afáka

Introduction et context’s presentation

Writing systems are witnesses to geopolitical events and reversals in history. At the same time, they are the terrain of cultural and societal issues.

As a type designer and researcher, I have been interested in the problem of designing a font for a writing system imbued by societal problems caused by colonialism.

How do cultural and identity issues of a population influence the genesis of a writing system? How do typographic design and representation in digital tools influence the visibility of these identities and cultures?

I choose to carried out a typographic work on the case of the Afáka, a Creole writing system. This syllabary get a strong african legacy. The goal was to highlight the different issues at stake, from the creation of the writing system to its design and its future entry into Unicode. In this way, I attempted to find a way to valorized an invisible culture through the proposal of a font family.

Overview of the writing systems included in “The World’s Writing System” project in 2018. 36 of them were created on the African continent.

The Afáka writing system is originally from Suriname, but is although representative of our societal heritage of the challenges of colonialism in African graphic and linguistic culture. In this article, we will see the genealogical links between this marroon syllabary and the writing systems of the African continent. Then, we will study the consequences for its development in digital tools. First, we will get acquainted with these African writing systems, to discuss the case of Afaka.

It was at the Atelier National de Recherche Typographique, that I began to investigate African and Creole writing systems and the link between them.

This project was supported between 2018 and 2020 within the Missing Scripts Program, created by Johannes Bergerhausen and Jérôme Knebusch, founders of The World’s Writing Systems and Decode Unicode project. This was mainly supervised by the professor and type designer Émilie Rigaud. The program is conducted in collaboration with The Script Encoding Initiative, represented by Dr. Deborah Anderson, who is also part of the Unicode consortium.

The data are mainly based on those of The World’s Writing Systems project and the ones delivered by the Unicode consortium, in 2018. However, some writing systems informations are not part of these data, such as those mentioned in Saki Mafundikwa’s writings. They were included in these analyses in order to establish a more complete view of the subject.

The African writing systems

Chronology 

Chonological order of writing systems from African continent, divided in two periods.

The history of writing systems from the African continent can be divided into two periods. The first, the longest, extends from the -13th to the 4th centuries. It can be considered as the earliest times of Writing Systems. In this period there are mainly hieroglyphic writing systems. The second period is briefer but got the most of the african writing system : From 1830 to the present day, 36 writing systems were created. These two periods are separated by sixteen centuries with no new writing systems recorded. This resurgence in 1830 corresponds to a period of «decolonisation» and a protectorate of Western states over the countries of the African continent. As a reaction to political and societal events, this context led to a search for cultural and graphic identity through writing. It should be noted that each period of creation of writing systems corresponds to the importation of writing systems by external populations, for commercial relations but also for relations of domination. The arrival of Latin comes just before the second wave of creation.

Importation of foreign writing systems.

Contexts of creation

Creating or importing a writing system is often accompanied by a socio-historical context. Two different creative approaches can then be noted. The first is an external influence : on the initiative of missionaries who used local symbols, as in the case of the Nigerian alphabet, the Medefaidrin. The second is at the initiative of the natives, in reaction to a dominant culture and the need to value one’s own cultural and graphic identity : This is the case of the Bamoun syllabary, from Cameroon. In the same way that societal and political contexts influence the creation of a writing system, they also have consequences on the alteration of this knowledge. Although banned in 1936, the Medefaidrin, which takes up ancestral symbols, survived, but has been dissolved during the civil wars. The Bamoun was invented by King Njoya at the end of the 19th century, but the colonial regime destroyed even the presses that printed its works. These writing systems were declined or even disappeared, to be replaced by the Latin alphabet.

Geography and genealogy

According to the available data, the Gulf of Guinea is the area with the most activity in terms of writing systems. Most of them date from the second wave of creation.
Moreover, we will see that they are very genealogically linked.

In 2018 there were 36 writing systems originating from the African continent. 16 of them are still in use (Red and Dark Blue). 26 are integrated into Unicode (Light and Dark Blue).

The Afáka syllabary

How it’s linked with African writing systems

Presumed Family Tree of the Afáka syllabary.

Comparison on VAï and Afáka sources.

According to available sources, Afáka is particularly linked to the writing systems of the West African Gulf. The hypothesis is that the symbols were exported with the slaves to South America, then, preserved by their descendants in Maroon societies, and finally reused within a writing system.

History of the population and customs

Ndjuka’s people repartition in Suriname.

The Ndjuka people are a population based along the Maroni River. They are part of the so-called Maroon people, fugitive slaves who resisted from domination and colonisation. This mixed society is made up mainly of deported African slaves and a smaller percentage of native Americans.They build alternative societies on the basis of the encounter between their different cultures and knowledge.

Jean-Yves Parris, in his book Interroger les morts, proposed an analysis of mourning among the Ndjukas. In it, he underlines the problem of the perpetuation of traditions. He wonders about the place that our contemporary society gives to the Ndjuka today. He then demonstrates that any reflection on cultural evolution is not insignificant and systematically refers to an identity question.

In the same demarch, we can ask ourselves what the creation of the Afáka syllabary and its development in digital tools, will bring for the Ndjukas culture.

Genesis of the Afáka syllabary

Extract from the story of the Afáka writing system’ s creation.

The syllabary was created around 1800. According to legends, its creator, Afáka Atumisi, saw a spirit in a dream. It ordered him to create a new script for his people. It ’s only in 1810, when Halley’s Comet passed through the sky, that Afáka Atumisi took it as a sign to spread the syllabary.

Many protagonists meet around the genesis of the writing system. The first one is Afáka Atumisi, and then, his first disciples, to whom he taught the writing system. Then, it was the european missionaries and scientists who began research with the Ndjukas in order to facilitate their christianisation. The Afáka writing system then becomes a field of cultural issues that clash with the Maroon tradition of the population. By creating a written language and spreading it Afáka Atumisi goes against the established hierarchy within the population. The writing system was later forbidden by the Ndjukas authorities, and its development remained very localised.

Transmission of the Afáka writing system.

Since 1810, the transmission of the writing system has been carried out by the Edebukumans (literally, Head Book Man), who pass on to each other the responsibility for the future of writing. The first one was Afáka Atumisi, and today, the actual Edebukuman is the specialist André Pakosie.

Three contemporay uses of the Afáka syllabary.

Today, the documents reporting on the syllabary are mainly presenting and translating archives. They relate the History, the customs and the traditions of the Ndjukas population.

But we can also found grammar books which teach how to use and read the writing system. Finally, we must mention the work of artists such as Marcel Pinas who use the Ndjuka heritage, including the syllabary in their works.

The syllabary has now very few users : barely 5% of Ndjuka speakers write with the Afáka Atumisi syllabary. Nevertheless, according to A. Pakosie’s observations, there is a growing of the interest in Afáka among the young generation. For my part, I would like to mention the research work of the typographer Agyei Archer, who wondered about the creation of diacritics.

Drawing an Afáka typeface

Overview of the syllabary in the proposal written by the linguist Mickaël Everson.

The Afáka is a syllabary composed of 36 glyphs. Among them, six new glyphs has been created by André Pakosie in order to be adapted to the Ndjukas’ contemporary language. Two of them are punctuation marks (Period and Question Mark). Finally, the syllabary has an ideogram glyph representing Halley’s comet.

Destination and process

The destination of this future font has been definedaccording to nature of the sources that have come down to us. As mentioned before, the manuscripts written in Afáka are nowadays laid out with texts explaining their historical contexts, offering translations, or in books teaching reading. From this point on, the aim was to produce a typeface that would promulgate and promote Ndjuka culture through this type of publication.

The typeface was therefore designed with two steps : Firstly, each glyph was catalogued in its various appearances, in order to determine its most common forms, and the place they hold within a text in the companion edition Afáka, the Ndjuka Writing System.This document dated them, classified them by type, indicated the different authors and referenced the occurrence of their appearance and their behaviour in a text. Secondly, by respecting the Ndjuka tradition and regularly referring to the specialistof the syllabary, the Edebukuman André Pakosie.

Board showing [NI] the syllable and André Pakosie’s notes for me.

Greases according to the nature and stakes of the sources

According to the sources available today, the font of the Afáka syllabary is designed to co-exist with the Latin alphabet, in the same way that Ndjuka co-exists with Western languages.

However, two contexts can be distinguished : In the first instance, texts in Latin speak of the Afáka writing system. They show each form of it in rather isolated form. Secondly, Ndjuka paragraphs written in Afáka followed by different translations, with the Latin writing system. Two grease are proposed two be adapted to this different contexts.

The Ductus according to the recurrence of shape

According to the Appendix, which listed the different forms for each syllable, some handwritten characters offer variations. These can be reported in 4 types :

  • The orientation of character

The syllables [KO] Q and [GO] S questioned even more the heights, the distribution of ascending and descending of the melt, because they are easily confused with each other.

Some of the characters had different orientations : horizontal, vertical, mirrored... This follows the way the author will execute the form.

  • The graphic gesture

Different degrees of roundness can be observed in some glyphs like this [DO] syllable.

The author’s gestures influence the drawing of the glyph in its fluidity and (non-)cursiveness.

  • The execution process

As in the syllable [ WE/WI ], looped endings could become circles.

According to the author’s interpretation, each typeface had different levels of geometrisation or essentialisation of its design.

-Interpretation :

This characters were easily interpretable. The BO syllable was very similar to a pencil drawing, while the A syllable was often drawn as a scripted lowercase.

These examples of glyphs that are almost figurative or very similar to letters or numbers used in Europe et interrogate a possible over-interpretation of form.

For one syllable, the forms of glyphs are often dissimilar from one source to another. Moreover, some syllables were easily confusing. In these ambiguous cases, to fall back on other forms would maybe allowed a more fluid identification. However, this option would surely have led to absurdities, by mixing variations from different periods. Indeed, are they as legible to users today as they were in 1910? This dilemma is closely linked to a second difficulty : the choice of sources. It was not just a matter of choosing a source and translating it into a vectorial translation. It was also a question of selecting the documents that were most consistent with what I was trying to achieve.It was from the editorial work of the Afáka, the Ndjuka Writing System annex that the first drawings of the writing system were sketched out. And these are indeed A. Pakosie’s comments made me decide on the forms to choose.

Greases of Maroni typeface family.

Stylistic sets of Maroni typeface family.

At the end of the research, two grease have been proposed. These are adapted to two type of used : A Demi version is adapted to the first case, for a highlighting of the isolated Afáka characters within a Latin text, and Regular characters propose to adapt to the use of a translation text, which includes whole paragraphs written in Ndjuka.

Two typographic style sets for each of the two weights have been proposed. The first contains the most horizontal forms, the second contains the vertical ones. Thus, the user can choose between two sets, or individually, character by character, depending on his use of the fonts.

Overview of the Maroni font in a translation context.

Overview of the Maroni font in a pedagogical context.

Conclusion

The Ndjuka syllabary of Afáka Atumisi is planned to integrate Unicode in the near future. It is still too early to predict its further evolution.

My intention behind this typographic project is to propose a design with enough uses and contexts for a valorisation of the Ndjka culture to be possible. This project is a proposal among many others. My interest is the role of writing systems as an affirmation of a culture.

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« Type rambling from Afrika »
Langage Culture Type International type design in the age of Unicode
ATypI-Graphis, 2002

Saki Mafundikwa, 2004,
« Afrikan Alphabets, The story of writing in Afrika »
Mark Batty Publisher, New York, 2004

Simon Battestini, 2006,
« De l’écrit africain à l’oral. Le phénomène graphique africain »
318 p., bibliogr, ill.,L’Harmattan, Paris, 2006

Thierry Chancogne, 2018,
« Histoire du graphisme avant la modernité en trois temps et cinq mouvements
– Premier temps. Avant l’écriture – Premier mouvement. Muthôs »,
École Supérieure d’art de Cambrai
Éditions Franciscopolis, Les Presses du Réel, Le Havre, 2018

Pierre Fournier, 2015,
Compte-rendu de recherche 2015 « Les signes sur le mur »
Atelier National de Recherche Typographique,  2015

University of Hawai’i Press, 1975
« Bush-Negro Languages »
Oceanic Linguistics Special Publications, No. 14, A Bibliography of Pidgin and Creole Languages (1975),
pp. 463-467, [ En ligne ] JSTOR www.jstor.org/stable/20006640

University of Reading
« Non-Latin Typefaces »
At St Bride Library, London And Department Of Typography Graphic Communication

essai
Benjamin Dumond

(ಥ﹏ಥ)

Si vous n’êtes pas étranger au monde des rêves, et que, par la force des choses, vous vous êtes souvent retrouvé à parcourir les récits nocturnes d’autres onironautes, vous n’aurez sûrement pas manqué une constante récurrente sur laquelle presque tous les rêveurs 
s’accordent : lire pendant un rêve est loin d’être simple. Abordez un paragraphe au royaume de Morphée et vous verrez les phrases n’être que des enchaînements de symboles confus, se métamorphosant autant de fois que le regard s’en détourne. La nuit, à travers le prisme de notre inconscient, quand les lettres ne sont plus chorégraphiées par Ombre et Lumière, le texte ne peut s’empêcher de se dérober, comme si gêné, il ne savait plus quoi faire de lui-même.

Rien n’empêcherait de poursuivre cette réflexion par ce qu’en disent les neurosciences : certaines zones du cerveau dédiées au langage sont moins actives durant notre sommeil qu’à l’état de veille, rendant confuse toute forme de communication verbale ou écrite. 
La réflexion-fiction engagée ici propose cependant d’explorer cette curiosité sous un autre angle et plante le décor suivant : et si nous n’étions tout simplement que conditionnés à penser l’écriture de manière concrète, matérielle et technique mais rarement de manière abstraite, la rendant incapable de se laisser aller librement au jeu dansant des recompositions de l’inconnu, empêchant ainsi les rêveurs d’arriver à concevoir nos paradigmes d’écriture autrement.

Pour y voir plus clair dans la manipulation de notions abstraites, il m’arrive d’explorer ce genre de problème en les anthropomorphisant tout comme le ferait un rêve. Que l’écriture se refuse autant à jouer le jeu de l’introspection propre aux songes, m’emmène à l'imaginer comme un être tourmenté par l’accumulation de dénis centenaires. Dans un coin de ma tête, je m’improvise thérapeute et, la faisant s’allonger sur un divan, je l’interroge : jusqu’où, Écriture, êtes-vous prête à accepter ce que l’on attend de vous sans rien dire ? Comment faites-vous la part des choses entre vos désirs et ceux que l’on vous impose ? Et si vous dépassiez la pression de votre surmoi, que souhaiteriez-vous être que pour l’instant vous n’êtes pas ?

Depuis quelques années, ces expériences de pensée m’ont rendu particulièrement curieux de la place que l’on accorde à l’imaginaire dans la production typographique et plus particulièrement du rôle qu’il y joue. Un grand écart constant s’opère dans ma tête entre d’un côté la réalité d’un marché, d’une histoire, de besoins, et de l’autre le fantasme de caractères dont la description serait au-delà du possible. Plus d’une fois des rêves m’amenèrent à penser que cette tension entre typographie du possible et typographie de l’impossible, extrêmes frontières d’un pays moins balisé qu’il n’y parait, pourrait trouver aujourd’hui dans un contexte de production inédit dans l’histoire de notre écriture un terreau vivace pour son développement.

Dans des moments où, le regard perdu dans un ciel nocturne dont la noirceur et l’immensité ne me laisse d’autre choix que de prendre du recul sur toutes les choses que je pense aller de soi, le business contemporain de la typographie m’apparaît à la fois incroyable et absurde. On y markette chaque jour l’art solide du langage, une invention au moins vieille de 6000 ans, tellement sur présente et ancrée dans nos existences qu’elle est indissociable du surpuissant développement de nos civilisations actuelles. Pourtant, ces incarnations «.otf» de nos écritures, dont chacune exerce à son échelle une infime pression sur l’évolution que suivront les formes des alphabets de demain, sont pour une écrasante majorité pensées, conçues, vendues et utilisées comme des produits de consommation lambda.

Dans le Sefer Yetsirah, récit cosmogonique de la mystique juive, une divinité crée l’entièreté du monde par des combinaisons secrètes de lettres sacrées, lancées à travers le non-être infini. Les kabbalistes perçoivent l’alphabet comme un objet métaphysique dont des générations entières d’occultistes ne pourraient qu’à peine effleurer les abysses. Face à ces récits, je ne peux m’empêcher de laisser s’ébranler mes certitudes. N’y a-t-il rien de plus à souhaiter à nos alphabets que le champ pratico-pratique dans lequel nous les parquons aujourd’hui ? En tendant l’oreille, il me semble les entendre murmurer une prière à Thoth, implorant que soit maintenant chassés les marchands du temple.

(╯□)╯︵ ┻━┻ ιαω

De notre naissance à notre mort, nous baignons dans l’écriture comme nous baignons dans l’atmosphère. L’agréable et tiède chaleur des lettres nous enveloppe et la lecture, comme une respiration, nous traverse d’une manière tellement évidente et ancrée qu’elle en est invisible. En lisant, le sens du texte est si éblouissant qu’il nous empêche de percevoir la pièce de théâtre de signes nécessaires à l’opération. La forme s’efface au service du fond comme un lac cristallin où faune et flore semblent léviter.

Nos lettres, acceptant les rôles des mots et des phrases, nous servent autant à nous orienter au travers de nos villes labyrinthiques que dans l’immensité d’internet. Elles sont les clefs fractales d’accès à une infinité de récits, des plus techniques aux plus fantastiques, portant parfois leurs messages sur des milliers d’années. Elles nous informent autant sur les composants d’un papier toilette qu’elles ordonnent les plus complexes formules mathématiques et abstraient des lois physiques à la source du fonctionnement même de notre réalité.

Leurs qualités sont pourtant loin d’être reconnues tant nous associons indistinctement forme et fond du texte, tant on nous a appris à ne pas conscientiser leur fonctionnement, au point-même de porter en étendard l’idée qu’il pouvait être normal de privilégier ce qu’une phrase raconte plutôt que comment elle le raconte. Pourtant, si nos characters étaient les comédiens d’une pièce de théâtre, jamais nous n’imaginerions balayer d’un revers de main toutes les possibilités des jeux d’acteurs, conçus ou improvisés depuis des milliers d’années, l’alchimie unique d’une troupe, sous le prétexte qu’il faut être le plus invisible possible pour laisser la vedette au texte de la pièce elle-même.

Un rêve commence... laissons place à un autre pan de réalité.

꒡ᘦ̲꒡ zzz

Nous sommes dans un grand théâtre dont la scène est construite et décorée avec soin par un expert. Une troupe de comédiens se met en place. Il leur arrive certains soirs de venir habillés de manière neutre, jean et t-shirt, mais ils ont décidé aujourd’hui de sortir le grand jeu et se sont déguisés. On leur a souvent reproché que le théâtre était ennuyeux, alors, par leurs costumes, ils espèrent installer une ambiance en jouant de codes culturels communs entre eux et les spectateurs. Ils sont méticuleusement placés selon une disposition pensée par le metteur en scène, qui utilise une méthode que ses prédécesseurs perpétuent depuis des centaines d’années : la hiérarchisation des rôles. Certains sont placés en avant de la scène et d’autres en arrière, mettant ainsi en évidence l’importance des personnages dans l’acte. Après qu'ils se sont installés, la pièce commence tandis que la salle reste allumée. Pendant trois heures les comédiens déguisés récitent leur texte d’une voix limpide tout en restant immobiles. De temps en temps une voix off, appelée voix italique, donne quelques indications traversant le quatrième mur comme des monologues intérieurs aux personnages, des descriptions ou contextes, ou la traduction de tirades jouées en langue étrangère. Il n’y a pas, dit-on, de meilleure manière que ces deux mécanismes pour donner à voir les intentions profondes du dramaturge et personne dans la salle ne semble en douter.

À la sortie de la pièce il est difficile de dire si les spectateurs sont conquis ou non par la mise en scène, mais la plupart sont d’accord pour dire que le texte était excellent. Quelques spécialistes du théâtre s’accordent sur les costumes apparemment bien cousus et l’un d’eux s’aventure même à dire que la maîtrise avec laquelle les tenues jouaient des codes contemporains tout en étant dans une continuité logique de l’histoire du théâtre était d’une intelligence rare. La voix de l’italique cependant ne fait pas l’unanimité, jugée absurde et en total désaccord avec le reste. Certains ne comprennent pas non plus pourquoi le metteur en scène utilise autant d’acteurs, alors qu’il aurait tout simplement pu se limiter à un seul habillé d’un costume variable, une invention américaine permettant à une personne d’endosser plusieurs rôles à la suite, en métamorphosant ses tenues au besoin. Il était devenu évident selon eux qu’il s’agissait d’un standard d’avenir, car en gardant le même visage pour tous les rôles à jouer la pièce devenait plus logique, harmonieuse et compréhensible. Les rares non-spécialistes qui traînent encore par là acquiescent, même s’ils n’y comprennent pas grand-chose. Qui sont-ils pour donner leur avis sur comment devrait se dérouler une pièce ? S’ils ne décèlent pas pourquoi la mise en scène était géniale, en tout cas, ils ont bien aimé le texte...

(-‸ლ)

Le rêve s’estompe... un bout de conscience nous rappelle du côté du miroir où nous avons conscience des réelles richesses du théâtre, que cette dystopie un brin poussive permet de faire ressortir : ce qui fait du théâtre un art unique ce ne sont pas ses costumes ni ses décors, mais ses inventions propres qui ne peuvent se jouer dans d’autres disciplines : le travail d’un lieu, un temps, un acte et un public. Parler le langage de la création en théâtre, c’est avoir une idée dans la matière même de ce qui le rend unique et lui donner vie par tous les moyens à notre disposition. Il y a acte de création théâtrale quand les costumes, décors, acteurs, lumières, musiques ne sont pas vus comme des fins en soi, mais qui par leur alchimie donnent naissance à quelque chose qui n’aurait pas pu prendre corps dans une autre discipline.

Ce que nous attendons du théâtre et que nous serions en mesure d’attendre des formes de notre écriture, c’est que, comme lui, elle transcende de manière unique son propos, non simplement par une certaine esthétique, mais par des inventions de mécanismes qui lui sont propres. Ces idées typographiques ne pourraient prendre corps dans aucune autre discipline car créées au cœur même de ce qui fait que l’écriture est écriture en tant que système. Elles ne feraient pas de la forme des lettres, de la construction des familles ou de leurs références historiques des fins en soi, mais viseraient par leur symbiose à créer des performances de lectures inédites. Dans un second temps, si ces actes de création typographiques touchaient les gens au point qu’ils soient répliqués, alors les standards de texte qui s’imposeraient répondraient à une tout autre logique que celle dirigée par les marchés d’aujourd’hui.

L’esthétique et la technicité du design de caractères ne peuvent pas être des fins, seulement des moyens. Un caractère est fait pour être lu, comme un film est fait pour être vu ou une musique est faite pour être entendue. Nous n’attendons que rarement que ces expériences ne fassent que donner à voir quelque chose de la manière la plus neutre qui soit, qu’elles ne fassent que communiquer. Toutes ces expériences décuplent ce qu’elles racontent précisément parce qu’elles dépassent la communication à l’infini, dans toutes les directions. Le cinéma a beau procéder d’une technicité au moins aussi complexe que la typographie, ce qui en fait une discipline vivante ne sont pas ses avancées techniques, mais ses auteurs qui y inventent sans relâche de nouvelles façons de l'inventer.

(.~◍`皿′◍~.)

Nous pourrions imaginer que la spécificité de la discipline typographique est de créer des «formes-systèmes» destinées à la lecture, des objets qui sont à la fois des dessins et des interfaces. Je trouve le mot interface éclairant car il fait apparaître de manière évidente que le dessin des lettres, au-delà de leur esthétique, active différentes facultés pendant la lecture.

Aujourd’hui on observe majoritairement trois fonctions :

①   Les formes typographiques savent faire emphase, attirer l’attention, structurer, hiérarchiser, grâce aux graisses et à la chasse.
②   Les formes typographiques savent marquer un appel hors texte, un extérieur, mais aussi, une langue étrangère grâce à l’italique.
③   Les formes typographiques savent invoquer des styles, et donc faire appel à des univers culturels partagés par une frange des lecteurs. Une typographie art-déco évoque une époque, une manière d’envisager l’art, des sentiments à l’égard du floral, etc. vis-à-vis de la période depuis laquelle nous la lisons. Une écriture gothique évoque aussi bien la période médiévale, que la puissance d’un groupe de métal ou la folie du Troisième Reich.

Plus discrètes encore que l’apparence de nos lettres elles-mêmes, il me semble cependant que ce sont ce que sont ces capacités là, les formes-systèmes en action, qui sont au cœur même de ce que uniquement la typographie est capable d’accomplir : performer une lecture. Aujourd’hui, il est plus que rare de rencontrer dans notre quotidien des caractères qui performent autre chose que les trois fonctions évoquées ci-dessus. Seuls quelques étudiants et dessinateurs diffusent de temps en temps des caractères qui posent et ouvrent de nouvelles questions mais dont les échos ne dépassent jamais le cercle infime d’une petite fraction d’intéressés, pour finir noyés dans un flot tsunamique de production de caractères aux fonctions uniformisées, occupant la quasi-totalité des espaces de lecture.

Comme nous sommes habitués à considérer les caractères typographiques comme des objets principalement esthétiques et communicatifs, il nous semble naturel de nous orienter dans cette jungle de fontes par leur style graphique, ou par leur capacité à être lisible selon tel ou tel support. Nous ne conscientisons pas qu’un caractère puisse performer la lecture selon d’autres méthodes que l’évocation de style, la hiérarchisation de l’information ou l’appel à un extérieur au texte. Nous sommes si absorbés par l’illusion qu’un caractère doit avant toute chose communiquer sans encombre le texte qu’il performe que nous ne nous posons même plus la question : 
« Ce caractère accomplit-il autre chose que ce que toutes les autres typographies ont déjà accompli tant de fois ? » Projetons-nous juste dans le fantasme d’un monde où chaque caractère typographique explorerait une nouvelle manière d’incarner un texte. Nous pourrions utiliser par exemple un caractère travaillant le problème de la vitesse. Une famille qui par sa « forme-système» pourrait invoquer différentes cinétiques, avec des déclinaisons Lento, Adagio, Moderato, Allegro, Prestissimo et non pas de graisse, de chasse ou de pente. Si nous leur laissions la place de se développer et d'être utilisés, un seul de ces caractères ne mettrait-il pas en branle la manière que nous avons d’utiliser le texte depuis toujours ?

Nous pourrions tout aussi bien imaginer un caractère qui travaillerait la notion de vérité dans un texte, donnant à voir des phrases plus ou moins honnêtes et s’interpolant en une variation «mensonges par omission». Nous pourrions repenser l’accouplement de deux lettres au sein des ligatures sous l’angle du consentement et travailler une fonte où chaque lettre est libre ou non de s’unir avec ses voisines. Nous pourrions composer des textes symphoniques grâce à des super-familles dont chaque fonte s’augmenterait d’un ton ou un demi-ton, mettant en scène le texte selon des modulations majeures ou mineures.

De ces puissances d’agir, l’auteur et son récit, le chercheur et ses équations, le philosophe et ses concepts, tous pourraient très certainement en faire des applications différentes. Il serait néanmoins malhonnête de dire que dans l’histoire de la typographie, aucun dessinateur de caractères n'a jamais proposé de nouvelles manières de concevoir des «formes-systèmes». Ils sont cependant loin d’être légion. Des fontes inhabituelles apparaissent de temps en temps et construisent un corpus de facultés alternatives de texte , mais finissent toutes autant qu'elles sont sans utilisateurs, sans promotion ni démonstration. Le récit habituellement brandi à l’encontre des caractères expérimentaux selon lequel l’écriture, dans une danse macabre darwinienne, fait survivre les idées d’écritures acceptées par la majorité trouve ici sa limite. Comment croire que de petits caractères expérimentaux aient la force marketing d’un Helvetica New ? Ces caractères étranges occupent une place infime sur la grande scène du jeu typographique, alors qu’ils opèrent précisément un acte de création, une possibilité pour la forme du texte de devenir autre chose que ce qu’elle est déjà et dont nous faisons semblant de ne pas voir l’ostracisation.

Si l’on est d’accord avec le Nous lisons mieux ce que nous le plus, de Zuzanna Licko, on pourrait émettre le corollaire, Et ce que nous lisons le plus est la production de peu de personnes, markettée de manière brutale, répondant pour la plupart à des briefs de communication, des modes, des traditions historiques, voire parfois, des aprioris auto-induits.

La conception des formes de l’écriture est discipline élémentaire au même titre que sa sœur jumelle, les mathématiques. Pourtant c’est peu de choses que de dire que depuis Uruk en -4000 où elles sont toutes les deux nées, les chemins empruntés par l’une et par l’autre ont été bien différents. La construction du champ des mathématiques a explosé de manière exponentielle grâce à l’invention et l’opposition des théories, la recherche abstraite et a constamment cherché à repousser ses limites dans une course effrénée vers l’inconnu. De son côté, l’écriture a misé sur une tradition solide et rassurante, dont les dogmes deviennent jour après jour plus indéboulonnables tant ils finissent par apparaître naturels, et ne peut se targuer que de peu d’inventions bouleversantes.

La forme de l’écriture n’est pas une technique, elle est un art six fois millénaire. Elle est irréductible à toute logique, à toute règle, à toute classification. Elle est l’inévitable étape de cristallisation des états d’être d’un texte sans qui aucune incarnation n’est possible. Actrices d’une pièce discrète en cours jusque dans les recoins les plus oubliés, les lettres jouent en secret. Leurs incantations nous parviennent, mais sommes-nous réellement en mesure de comprendre le culte à mystère qu’elles servent ?

À l’heure d’aurore, au creux d’un rêve clair caractéristique du matin, j’observe une discipline typographique responsable du foisonnement du processus de lecture même. Inventant dans un flux constant de nouvelles manières d’activer un texte, elle redonne à la lecture une popularité qui n’a rien à envier au cinéma, à la musique ou aux jeux-vidéos. Grâce à une panoplie d’inventions dont une vie entière ne suffit à faire le tour, chaque paragraphe lu est une performance interactive unique. Les classifications n’amusent plus que quelques historiens passionnés, et Monotype survit péniblement des quelques royalties perçue pour les derniers revivals de l’histoire de l’humanité. Dans le fond, un homme à tête de babouin psalmodie un passage du Feu Pâle de Vladimir Nabokov :

Nous sommes absurdement accoutumés au miracle de quelques signes écrits capables de contenir une imagerie immortelle, des tours de pensée, des mondes nouveaux avec des personnes vivantes qui parlent, pleurent, rient. [ ...] Et si un jour nous allions nous réveiller, tous autant que nous sommes, et nous trouver dans l’impossibilité absolue de lire ?

_〆(。。)

Assise, les pieds posés sur le bureau, Josy est pensive. Fixant le plafond en placo de spiruline, son regard navigue en circonvolutions cherchant à déceler dans la forme hiératique des aspérités une logique cachée. Sur son écran de papier, 4 heures se sont écoulées depuis qu’elle a créé un nouveau document, encore vide, dans le logiciel de dessin de caractères.

Elle fixait cette page blanche depuis ce matin quand, à travers sa fonderie autogérée, un groupe d’écrivains avait déclenché une demande de financement participatif pour payer une commande qu’ils souhaitaient lui adresser. En moins de quelques heures, ils avaient atteint la somme requise pour débloquer la commande : 5000€. Ce collectif cherchait à réhabiliter certains penseurs du XXe et du XXIe siècle en publiant des textes sous leur forme d’origine. Leur souhait était que Josy dessine une version contemporaine d’un caractère des années 2000. La designeuse essayait donc depuis 4 heures de se souvenir tant bien que mal de ses cours de typographie où, pour la dernière fois, on lui avait parlé de cette pratique maintenant oubliée du revival qui consistait à transposer dans des paradigmes contemporains les caractères du passé.

Pour être totalement honnête, elle ne voyait pas comment faire. 150 ans la séparait des années 2000 et depuis, c’était peu de chose que de dire que la forme de l’écriture avait évolué. On utilisait peut-être encore l’alphabet latin, mais cela faisait déjà plusieurs années que des écoles de pensée parlaient maintenant d’alphabet «post-latin», ou Haoutine. D’origine vietnamienne, ce dernier terme s’était imposé tant les dessinateurs de la péninsule est-asiatique avaient participé aux mille nouvelles directions qu’avait empruntées la typographie.

Ce qui embêtait en premier lieu Josy, c’était qu’elle allait devoir dessiner des lettres sans icares. Ces terminaisons à la symétrie complexe avaient remplacé depuis au moins 70 ans les empattements, et ce dans 95% de la production contemporaine. Elles avaient non seulement doublé la lisibilité, mais permettaient aussi avec une aisance que tout le monde avait trouvé déstabilisante, de moduler l’écriture dans des variations de temps subtiles. Imaginer un texte sans eux, revenait clairement à dire aux lecteurs «Démerdez-vous pour comprendre comment chaque phrase prend place dans la temporalité de la pensée» et la dernière chose dont avait envie la designeuse c’était de se retrouver à faire quelque chose d’illisible. Déjà trois commentaires avaient souligné son attitude anticonformiste dans des précédentes commandes. Si ça continuait comme ça elle finirait par ne plus avoir de commandes. Elle avait bien tenté un entre-deux, en essayant de réduire ses icares au strict minimum, mais les lettres ressemblaient plus à un alignement d’herbes folles qu’à quelque chose de crédile.

Faire une famille qui ne se diversifie que par la graisse et l’italicité, 
à la limite, elle pouvait le concevoir. La plupart des internautes trouveraient ça austère, mais remis dans son contexte, elle serait pardonnée. Elle n’aurait qu’à faire ce qu’on attend normalement d’une dessinatrice quant à la production d’une fonte, écrire un bref essai qui explique sa démarche face à ce problème monté de toutes pièces.

La designeuse tape rapidement sur son terminal une requête vers l’EPÉ, l’Encyclopédie Planétaire des Écritures. Ce wiki avait été mis en place quand toute production en rapport avec l’écriture avait été décrétée domaine public par l’ONU. On attendait de tout étudiant en design des formes d’écritures qu’il sache s’en servir et qu’il s’en serve activement. L’encyclopédie pouvait basculer en plusieurs modes, se réorganiser à la volée selon les critères entrés et pouvait aussi bien afficher une histoire très linaire, que trier les fontes selon les écoles de pensée des multitudes de théories en vogues.

Josy explore d’abord trente minutes le mode «spécimens» et surfe au milieu d’images des 104 millions de formes d’écritures produites depuis le début de l’histoire de l’humanité. Elle espére y trouver avec un peu de chance des exemples de caractères de transition entre le XXe et les nouvelles formes d’écriture, mais c’était sans compter que cette période était précisément le moment où le principe d’hybridation des styles avait été abandonné sans trop qu’on sache pourquoi.

Elle enchaîne sur le mode «théories», qui donne à lire de manière libre les écris associés à chaque caractère. Elle passe en revue autant de propositions fantasques, que d’autres très fonctionnelles, puis réorganise les idées en zones géographiques pour filer en direction des derniers caractères d’un groupe d’artistes chercheurs russes. Josy les suit avec assiduité depuis qu’ils ont sorti une famille qui avait empêché une guerre entre deux communes de la région de Kostroma. Mais malgré la relecture de quelques idées qu’elle avait déjà metasurlignées dans leurs articles, rien de nouveau sous le soleil. Elle n’était pas plus avancée qu’elle ne l’était déjà quatre heures auparavant.

Au bout d'un moment, Josy fini par laisser l’écran s’éteindre. Peut-être qu’il était déjà un peu tard pour rentrer dans de telles considérations. Demain devait avoir lieu un groupe d’échange avec un collectif associé, et ensemble, ils arriveraient sûrement à trouver quelque chose. Une nouvelle dessinatrice, Cassandre, était arrivée un mois auparavant et les méthodes de réflexion qu’elle avait inventé avaient plus d’une fois débloqué le groupe. Le brainstroming en état hypnotique par exemple, avait permis à un des membres de trouver une manière pour que deux lettres distantes de plusieurs pages soient ligaturées. On n’était pas encore très sûr de ce à quoi ça allait bien pouvoir servir, mais Hélène, le dessinateur à l’origine de l’invention, disait qu’il avait vu passer sur le réseau un post de poètes colombiens qui en avait fait un usage plus que prometteur. Au creux de son lit, Josy regarde le cadran-papier de son réveil matin avant de laisser le sommeil l’emporter. Les icards des chiffres étaient tous verticaux, soulignant une temporalité courte. Elle savait qu’elle n’avait plus que cinq heures de sommeil avant de devoir se lever.

(ง ̀_́)ง Ce texte a été écrit, réécrit et réréécrit en 2021 par Benjamin Dumond, puis lu, relu et rerelu, par RB, AM, RVDB, LD, CL, MG et HA ! Il performe sa lecture en jean et t-shirt, à travers le Fragen de Lucas Descroix.

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Quelle formation as tu suivi ? Comment tu es arrivée au design graphique ?

J’ai d’abord étudié les arts appliqués à Mons à la Haute école Louvain en Hainaut. J’ai ensuite suivi un cursus en développement front-end au centre decompétence de l’aérople de Gosselies. Au final, si je suis arrivé à la communication graphique, c’est en réaction à la publicité ultraconsumériste, celle que j’avais appris sur les bancs de l’école en cours de communication. J’étais pourtant convaincu qu’on pouvait communiquer pour «changer le monde», mais je ne savais pas encore comment. J’ai d’ailleurs débuté ma carrière dans une agence événementielle, j’ai beaucoup appris au sein des équipes à produire vite et bien. Cette expérience a également confirmé le fait que j’avais besoin de travailler de façon engagée pour des clients engagés; durable pour l’humain ou pour la planète.

Nature&Transmission, Dossier de presse broché

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Dans quel domaine du design graphique es-tu plus à l’aise et pourquoi ?

Je ne sais pas exactement ce qu’on entend par «domaine», selon mon expérience, le design graphique est une pratique qui m’intéresse si elle est exercée de façon globale et permet à la marque de parler (de bien parler) d’elle. Je ne vais donc par émettre de choix de coeur entre mise en page, webdesign, ou motion design par exemple.

Pour quelle secteur préfère-tu travailler ? As-tu un axe de recherche / de travail privilégié ?

Je pense que la motivation première est de relever un défi. Ceci passe par l’étude et l’apprentissage de ce qui constitue l’histoire du client, le dialogue entre lui & moi afin répondre par des solutions graphiques à une problèmatique donnée. Aussi, comme je le citais plus en avant, j’essaye de travailler avec des entreprises qui tendent à faire valoir des valeurs, je pense peut-être naïvement, que la communication peut changer le regard que nous portons sur ce que nous consommons et donc redonner confiance aux gens au travers des produits ou services qu’ils utilisent. Quelque part, c’est être acteur pour la nouvelle société en marche. Comment tu organises ton temps entre recherches et commandes ? La recherche fait partie intégrante de la commande, l’une ne va pas sans l’autre.

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Copains, Icône / Glyphe

Copains, Icône / Glyphe

Quelle est ta méthodologie de travail ?

Il y’a toujours une phase d’écoute, on établit le dialogue avec le client, c’est la partie « psychologique » car il s’agit de déceler au travers d’un dialogue les problèmes et émettre des hypothèses de solution; mais aussi analyser l’état d’esprit général et le champ des possibles en terme de réalisation. Est-ce que la demande est juste et adaptée comparativement au souhait de base ? Sinon que proposer pour atteindre cet objectif ? La question qui domine: comment être et rester juste ? Ensuite il y’a l’atelier moodboard; chaque membre qui constitue l’entreprise est libre de donner son avis, d’interagir en réaction aux visuels proposés; après cela on atteind la partie purement créative, la recherche graphique, durant cette étape différentes pistes de réflexion seront proposées et le client choisira celle qui répond le plus à ses beoin et à ses affinités. Pour finir, une fois la piste stabilisée, on arrive à la livraison des supports qui ont fait l’objet du devis initial.

Quel projet déjà réalisé est le plus représentatif de ta pratique et pourquoi ?

Je citerais EPHREM, une manufacture de fours à bois ancrée dans la vallée de Durance (Sud de France). Ils réalisent leurs fours sur base d’une terre volcanique locale: la pouzzolane, un matériau naturellement réfractaire. Virginie et Sylvain ont racheté l’ancienne manufacture et son entrain de moderniser l’outil toute en préservant le savoir faire et la technique ancienne. Il fallait que la nouvelle identité visuelle s’inscrive dans la modernité tout en conservant une rugosité, un aspect brut; trace immuable et authentique du passé. Pour se faire le jeu typographique, la plalette couleur le lettrage, tout comme le stamp qui composent le logo ont été travaillé de façon a rappeler cette ambivalence. Le nouveau site internet et les brochures qui accompagne les différentes gammes de fours sont encore en cours de finalisation.

EPHREM, Moodboard (planche)

EPHREM, inspiration typographique

EPHREM, inspiration typographique

EPHREM, construction du symbole

EPHREM, Symbole

EPHREM, Logotype

EPHREM, Business Cards, impression sur Gmund teinté dans la masse

EPHREM, ToteBag

Si tu devais faire un pont avec une autre pratique artistique, laquelle serait- elle et pourquoi ?

L’écriture, car je vis la pratique du graphisme et chaque nouveau projet comme si j’ouvrais à chaque reprise un nouveau livre et me plongeais dedans. à chaque fois une nouvelle intrigue, une nouvelle découverte, une nouvelle issue, une nouvelle façon de faire, une nouvelle équipe. Le livre est une sommes caractère et de fontes; ma partique du graphisme est elle aussi nourrie de caractères et typographies. Qu’est ce qui nourrit / inspire ton travail / ta pratique ? Dans l’absolu, il n’y aucune règle fixe, je suis constamment en veille de ce qui se passe dans le monde du graphisme mais pas que; la recherche pour moi peut passer par un fait de société, tout comme découvrir durant une randonnée la carcasse d’un vieux tracteur bariolé de plein de typographies d’époque, ou encore la visite d’une expo, la lecture d’un bouquin. C’est un mode de vie en fait qui oscille entre imaginaire, curiosité et applications concrètes.

Tu as fait une formation davantage liée au web au début de ton cursus,  comme les outils numériques évoluent très rapidement, quels sont les moyens que tu utilises pour parfaire et poursuivre ton apprentissage ?

Je pense que le seul moyen de pas perdre les pédales dans le monde-du-web-ultra-rapide, c'est de pratiquer quotidiennement, un peu comme pour la course à pied, se donner des challenges pour ne pas stagner uniquement dans son domaine de confort, tester de nouveaux langages, de nouvelles techniques se frotter à l'inconnu, rencontrer d'autres professionnels, participer à des hackathons etc. En ce qui concerne le webdesign, l'ergonomie évolue aussi continuellement, et comme on le fait tous en veille graphique; C'est important de garder un oeil sur ce qui se passe sur internet en matière de web. 

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Tu parles à plusieurs reprises de la notion d’engagements, de valeurs. Comment intègre-tu cette partie dans tes projets aujourd’hui ?  Et comment le partages-tu avec tes commanditaires ?

Ca démarre toujours par un libre échange, un peu comme on pourrait l'avoir entre deux amis autour d'une tasse de café. Il y'a une grande partie du métier (et même de la vie) au final qui fonctionne à l'intinct, à la sensibilité, on sent si ça va le faire ou pas. Je n'ai pas vraiment de charte, d'outil ou de jauge qui me permettent de répondre de façon tout à fait construite et systématique à cette question. Je trouve que dans nos vies on analyse tout, tout le temps, on est toujours dans le contrôle. De mon coté, Dans mon métier, j’aime alors garder un part de liberté. Et donc pour en revenir à ces engagements et ces valeurs, ils émanent naturellement dans la discussion; au même titre que ceux du commanditaires. On voit si c'est un mix-match-gagnant, si nos visions coïncident, si on a quelque chose à vivre ensemble. Dans le processus de travail en tant que tel, j'essaye qu'il soit le plus collaboratif possible au sein des équipes. C'est à ce moment là que l'humain se révèle. 

Generation +, Magazine Uccle, Monogramme Stencil

Tu partages souvent dans tes mots la notion de typographie. Est ce que c’est une pratique qui t’intéresse et si oui qu’est ce qui t’anime là dedans? Aimerais tu dessiner des caractères ?

La typographie c'est très important, je dirais même que ça rythme ma partique du graphisme. On dit souvent, "montre moi ton écriture et je te dirai qui tu es" propos issus de la graphologie qui pour moi se rapproche très fort de l'usage d'une fonte pour une marque. Si une écriture franche, ample et excentrique peut révéler le caractère nerveux et audacieux de son propriétaire, il en va de même pour une marque qui choisit d'arborer telle ou telle typographie. J'ai créé une typographie NOOA, il y'a plusieurs années, j'y ai pris beaucoup de plaisir à l'époque. Aujourd'hui, il y'a plein de nouveaux outils que j'aimerais essayer comme Glyph par exemple qui offre une certaine facilité dans l’exercice notamment pour la création de fontes variables; Toutefois pour bien faire, il faut se donner le temps et c'est un métier à part entière. Métier avec lequel je renouerai peut-être un jour. 

Tu parles du projet EPHREM basé en France. Dans quel rayon géographique se retrouve les porteurs de projets que tu accompagnes ? Qu’elle est ta méthodologie pour parvenir à rencontrer de nouveaux clients ? 

J'accompagne des entreprises géolocalisées un peu partout dans le monde au final. Surtout en Belgique, en France et à New-York. Ca c'est naturellement fait et je pense que la plateforme Behance sur laquelle je suis présent et pas mal visité joue un rôle dans ce maillage. 

INDEX MEDIAS
Anaîs Bourdet
Après-film Fig.1
Après-film Fig.2
Après-film Fig.3
As, Not For : Détrôner nos absolus
As, Not For : Détrôner nos absolus — discussion avec Jean-Sylvain Tshilumba Mukendi
Atelier Brenda
Bahia Shehab
Base Design
Benjamin Dumond
Building Paris
Château Fort Fort
Clara Lobregat Balaguer
Common Interest
Cyril Makhoul
Émilie Aurat
EXEMPLE conf/expo/… à dupliquer
EXEMPLE VIDEO à dupliquer
G-U-I
GR20
Graphisme & féminisme
Hélène Mourrier
Hey
Jérémy Landes
Kidnap Your Designer
Léonore Conte
Love Letters
Marie-Mam Sai Bellier
My name is Wendy
Na Kim
ōnō studio
ORTYPE
Projection Graphic Means
Projection Sign Painters
Rachel Thonart Nardellotto
Roxanne Maillet
Sara de Bondt
Sarah Boris
Speculoos
Studio Feed
Studio Meta
Studio Spass
Studio Studio
Super-Structure
Table ronde We Are Graphic Designers, Feed, Love Letters
Tania Prill
Under The Radar: Underground Zines and Self-Publications 1965–1975
We Are Graphic Designers
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